Le concile de Nicée (325)

Le concile de Nicée est certainement un des évènements les plus connus de l’histoire de l’Eglise. Premier concile reconnu comme « œcuménique » par la plupart des grandes Eglises chrétiennes, sa confession de foi n’est aujourd’hui doctrinalement rejetée que par certaines communautés chrétiennes non-trinitaires.

Toutefois, il est parfois présenté de manière très caricaturale, notamment à des fins polémiques. Il me paraît donc nécessaire de revenir plus précisément son déroulement.

Les origines de la querelle

Pour comprendre ce concile, il faut remonter quelques années en arrière et se rendre à Alexandrie à la fin des années 310. A cette époque, un prêtre nommé Arius enseigne qu’il y eut un temps où le Fils n’existait pas. Le Fils était certes supérieur à toute la création, mais Il n’était pas absolument égal au Père, puisqu’il était lui-même une créature.

En soi, cet enseignement n’est pas nouveau et on le trouve attesté dans la littérature chrétienne ancienne, notamment dans le Pasteur d’Hermas. Toutefois, à cette époque et dans ce milieu, il choqua certains fidèles et certains collègues d’Arius et celui-ci fut finalement condamné par son évêque, Alexandre.

Après cette condamnation, Arius fit appel à d’autres évêques, notamment Eusèbe de Césarée, qui était comme lui un disciple de Lucien d’Antioche, qui réunirent deux conciles, en Bithynie et en Palestine, pour examiner l’affaire. Ces conciles déclarèrent qu’Arius était orthodoxe et demandait à Alexandre de le réintégrer dans l’Eglise. Celui-ci refusa et la situation s’envenima.

L’intervention impériale

Prévenu de ses problèmes, Constantin envoya en 324 une lettre aux différents protagonistes pour leur demander d’arrêter de se disputer sur cette question, lui-même estimant que les différentes opinions étaient acceptables. En somme, l’empereur voulait maintenir le statu quo ancien et jugeait que cette querelle théologique était inutile à l’Eglise et nuisible à l’Empire.

Toutefois, la lettre ne réussit pas à calmer les passions et Constantin fut obligé de convoquer une grande réunion d’évêques. Ces évêques, qui venaient de tout l’Empire, même si les Orientaux étaient largement majoritaires, et même de régions extérieures à l’Empire, se réunirent dans la ville de Nicée.

Notons que l’Eglise de Nicée était à ce moment dirigée par Théognis, qui était un ami d’Eusèbe de Césarée et donc plutôt favorable à Arius. Ainsi, on peut dire qu’Arius et ses alliés « jouaient à domicile ». C’est un point largement passé sous silence, mais qu’il convient de souligner,

Les décisions théologiques du concile

Arius n’est en effet pas seul, mais bénéficie au contraire du soutien de plusieurs évêques et pas des moindre. Outre Eusèbe de Césarée, il faut aussi signaler un autre Eusèbe qui est évêque de Nicomédie. Ce détail est important car Nicomédie était une résidence impériale.

Malgré cela, Arius et ses partisans sont mis en minorité lors du concile et ils sont finalement condamnés doctrinalement, puisque la confession de foi finale affirme que le Fils est homoousios (consubstantiel) au Père.

L’assemblée ayant tranché, Constantin décide donc, en tant qu’empereur, de soutenir politiquement ce choix doctrinal et condamne à l’exil les dissidents.

Il faut cependant noter que si Constantin est bien intervenu à ce moment là, ce n’est que pour soutenir une décision prise par les évêques. Or, cette décision ne correspondait pas à la volonté première de l’empereur.

Les suites du concile

Par ailleurs, une autre partie importante de l’histoire est bien souvent ignorée, l’attitude de Constantin après le concile.

Si sur le moment, les adversaires d’Arius ont gagné, dans les années qui suivent plusieurs d’entre eux, les plus importants, ont aussi été sanctionnés par l’empereur, tandis qu’Arius de son côté a fini par être réhabilité.

A la fin de sa vie, c’est vers Eusèbe de Nicomédie que Constantin se tourne pour être baptisé. Par ailleurs, celui-ci a ensuite terminé sa carrière en tant qu’évêque de Constantinople, qui était alors devenue la capitale de l’Empire.

Après la mort de Constantin, l’Empire est partagé entre ses trois fils. L’un d’eux, Constantin II (337-340) est mort rapidement, et les deux autres ont fait des choix religieux différents. Si Constant (337-350) qui règne en Occident est fidèle à Nicée, Constance II (337-360) qui règne en Orient, puis dans tout l’Empire, est au contraire un adversaire des décisions doctrinales prises à Nicée. Il ira même jusqu’à convoquer un autre concile à Constantinople en 360 pour annuler la confession de foi de Nicée qui affirmait que le Fils était « consubstantiel » au Père.

Conclusion

En conclusion, nous pouvons dire que les décisions doctrinales prises au concile de Nicée ne dépendent absolument pas des idées personnelles de Constantin. Celui-ci voulait au départ éviter cette querelle théologique. Devant l’échec de cette première politique, il est ensuite intervenu pour imposer les positions doctrinales du parti vainqueur. Toutefois, il a toujours eu le souci premier de préserver l’unité de l’Eglise et n’a pas hésité à exiler les responsables les plus radicaux, quelque soit leur parti. Ainsi, loin d’être un nicéen intransigeant, il a au contraire condamné à l’exil plusieurs évêques qui défendaient la foi de Nicée, dont le plus connu est sans aucun doute Athanase d’Alexandrie.

Bibliographie

Maraval, P. (1997). Le christianisme de Constantin à la conquête arabe. Paris : Presses Universitaires de France.

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A propos David Vincent 300 Articles
Né en 1993, David Vincent est chrétien évangélique et doctorant en sciences religieuses à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes (#GSRL). Ses recherches portent sur l’histoire de la théologie chrétienne et de l’exégèse biblique, les rapports entre théologie et savoirs profanes, et l’historiographie confessionnelle. Il est membre de l’association Science&Foi et partage ses travaux sur son blog et sa chaîne Youtube.